LE
GRAND BANC
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En écrivant, et en mettant en scène «le Grand Banc», j'ai eu envie de rendre hommage à nos marins du Clos Poulet, mais aussi de montrer comme la terre et la mer sont étroitement liés par chez nous.
Je me suis souvenu de ces groupes de paysans, qui tout de suite après la guerre, venaient ici à Saint-Coulomb pour travailler. Ils arrivaient des contrées moins riches de Bretagne pour louer leurs bras à l'agriculture locale qui manquait d'ouvriers puisque -les hommes partaient en mer. C'était alors toute une horde de célibataires qui venaient arracher les pommes de terre, couper les choux et qui restaient pour le foin. lis essayaient de se fixer sur place parce qu'ils trouvaient là un véritable paradis terrestre où tout poussait. C'était loin d'être le cas, là d'où ils venaient.
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Elle s'arrête face à la mer pour dialoguer avec son promis, celui qu’elle attend pour se marier en septembre, dès le retour du bateau.
Lui, l'étranger, il se sent attiré. Il est presque épris de cette silhouette fragile qu'il voit tous les jours et dont les yeux sont capables d'exprimer tant d'amour à quelqu'un qui est si loin. ça le dépasse complètement ! Il n'a jamais vu ça dans son pays.
Comme elle est promise, il sait qu'il n'a aucune chance de pouvoir la courtiser ou la séduire mais il est totalement conquis par elle. Lui aussi, il est impatient de connaître ces hommes - pour lesquels le cœur des femmes bat si fort - ces hommes qui bravent tant de dangers pour simplement gagner leur vie. Il est totalement fasciné ! Il attend et quant le bateau revient en novembre, le pavillon est en berne. Le bateau est en deuil et la petite lavandière ne reverra hélas jamais son promis... Il décide alors de s'embarquer lors de la prochaine campagne de pêche et de vivre dans ce monde de marins. Inconsciemment, il veut embrasser la vie de ces hommes pour conquérir et mériter ainsi, par l'amour de la mer, le cœur de sa jolie lavandière.
J'ai également eu envie de faire ce film pour une autre raison. Tous les hommes de ma famille étaient marins. Mon grand-père est allé à Terre-neuve depuis l'âge de 1 3 ans jusqu'à 50 ans. C'est grâce à sa pension que j'ai pu aller au collège jusqu'au bac. Il avait trois frères qui ont tous péri en mer du côté de Saint-Pierre-et-Miquelon. En réalisant le tournage, je ne raconte pas leur histoire mais je me rapproche d'eux. Je me souviens qu'au collège, il y avait des auteurs dont on ne nous parlait pas et que j'ai découverts ensuite. Il en est ainsi d'Ernest Renan qui dit, dans «Les souvenirs de jeunesse», quelque chose qui m'a décidé à réaliser le Grand Banc : «Peu importe si la ville d'Ys a existé ou non, même si les marins racontent que par tempête ils voient le sommet des clochers aux creux des vagues et qu'ils entendent sonner les cloches. L’important c'est de savoir que, dans le cœur de chaque breton, il y a une ville ensommeillée et légendaire, comme la ville d'Ys, qui ne demande qu'à se réveiller quand l'âge arrive ». Renan ajoute : «Jamais je ne me suis senti plus tourné vers l'avenir que quand je suis resté des heures et des heures à écouter sonner les cloches de ma ville d'Ys !».
Pour ma part, j'ai entendu sonner ma ville d'Ys. J'ai entendu les voix de ces marins terre-neuvas qui, engloutis là-bas, ont envie qu'on témoigne de leurs difficultés de vie et de l'importance économique de leur dur méfier, non seulement à travers le Clos Poulet mais dans le pays tout entier. Ils veulent faire savoir que la pêche à la morue a nourri la France entière et une partie de l'Europe pendant des décennies. Par le Grand Banc, je veux me faire leur interprète 1 Par la suite, après avoir mené à bien cette mission, j'ai très envie de raconter une tranche de la vie de Rabelais. Il est temps en effet que nos enfants apprennent que son oeuvre contient une pensée profonde qui est bien autre chose que la simple gaudriole qu'on a pour habitude de nous montrer !
Au fait, en parlant du collège, j'espère que « les copains de la classe » sont tous encore bien là et en forme. J'aimerais bien les rencontrer une fois ou deux pour qu'ils me disent comment ils ont su rester jeunes hommes si longtemps. J'aimerais bien les revoir ou qu'ils m'écrivent par le biais de Semper Fidelis.
Hervé BASLE
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Dernière mise à jour : 25 février, 2004 - contact